Projection du film : Iracema, une liaison transamazonienne ⁄ Iracema: Uma Transa Amazônica
couleur ⁄ 95′ ⁄ ST : FR / un film de Jorge Bodansky, Orlando Senna - Brésil, West-Duitsland - Allemagne de l’Ouest, Frankrijk - France 1974, Paulo César Peréio, Edna de Cássia
Un routier réactionnaire, brisant la vie d’une jeune prostituée indienne. Entre narration ethnographique et regard politique, un « road movie » dénonçant le nationalisme étriqué du CinemaBrésil 1970.
Cinematek – Salle Jacques Ledoux
9 rue Baron Horta – 1000 Bruxelles
Mercredi 01/02 à 19h – Billets > ICI
Critique de Libé : Iracema de Jorge Bodansky – par Louis Skorecki
Jorge Bodansky, extraordinairement filmé en 1974. En fait, cela fait près de vingt-cinq ans que ce passionnant cinéaste pauliste (1) réalise ses films attachants, à la lisière du documentaire, à l’ombre blanchie de la fiction la plus sèche. Son dernier opus connu, attachant mais décevant, est Terceiro Milenio (1982). Iracema est une splendeur luxuriante, un film hystérique et sagement sensuel, un mélo d’amour. Il n’est pas inutile de rappeler qu’un an plus tard, le même Bodansky signait une oeuvre jumelle d’Iracema, le très étrange et inexplicable Gitirana, qui s’accroche également aux basques d’une jeune fille pauvrement sauvée de la déchéance par le cinéma et la religion. De formation technique (il a commencé comme photographe et chef opérateur), Bodansky instille dans ses deux docu-fictions enfiévrées une magie qui a définitivement à voir avec l’hypernetteté des film ultraréalistes nord-américains. Lui, de son côté, filme plutôt à l’épaule ses histoires de passion, de mort, de progrès. Dans Iracema, comme dans Gitirana, il s’agit de raconter, à la première personne du féminin à peine anthropologisée, les mésaventures d’une Indienne qui sort à peine de sa forêt vierge (menacée par les projets autoroutiers capitalistes). Avec Iracema, Bodansky prouve son élégance documentaire et son génie raconteur. Il y a dix ans, fidèle à sa manière concise, presque brutale, de conceptualiser ses idées de juif tropical égaré dans l’une des plus grandes mégapoles du monde, Jorge Bodansky répondait de deux belles phrases à notre Libé-question: «Pourquoi je filme? Je fais du cinéma parce que j’aime voir. Le réel est ma fiction.» Que devient Jorge B.? .
(1) C’est aussi de ce grouillant et «new-yorkais» Sao Paulo rival historique de Rio de Janeiro où naquirent et prospérèrent toutes les stars du cinéma novo brésilien que viennent des cinéastes aussi fabuleux que le pornographe de série B Carlos Reichenbach fils, le filmeur kitsch underground Rogerio Sganzerla ou la très singulière ex-prof de cinéma Suzanna Amaral.